Mohamed Selhami
Pourquoi acheter, au prix fort, de l'espace dans des revues étrangères, pour des publi-reportages et des couvertures qui ne sont vendus qu'au Maroc?
L’info et la réclame
Que se passe-t-il à Tindouf, en territoire algérien? Un soulèvement en circuit fermé? Une boucherie derrière le rideau de sable? Depuis une quinzaine de jours, les nouvelles qui arrivent des camps du Polisario, où sévissent les capos de Mohamed Abdelaziz, sont hyper-alarmantes. Parmi les réfugiés qui ont fait de vieux os sous les tentes et le souffle brûlant du chergui, ou qui y sont nés, ceux qui en ont encore la force morale et physique ont exprimé leur ras-le-bol quant à des conditions d'existence qui ressemblent à une malédiction. La répression a été terrible.
Notre radio-télévision et nos journaux en font état. Quasiment tous les jours. Mais nos médias seulement. À l'étranger, à l'exception de journaux de moindre importance, c'est le black-out. C'est à croire que les canaux médiatiques d'Europe et d'Amérique sont obstrués par les tempêtes politiques du Sahara lorsqu'elle frappe Tindouf. Motus et bouche cousue. Ni infos, ni commentaires. Par contre lorsqu'il y a une manif “normale” de jeunes chômeurs à Laâyoune ou à Dakhla, avec ou sans provocateurs infiltrés juste pour
brûler le drapeau marocain et crier à l'indépendance du Sahara et à la gloire du Polisario; ce sont tous les médias de la Méditerranée du nord qui accourent. Les Espagnols font quasiment un pont aérien entre Madrid et Las Palmas et débarquent par charters entiers. Quant aux déclarations de la diplomatie marocaine et des partis politiques, toutes tendances confondues, aux témoignages d'anciens prisonniers de Tindouf ou d'ex-dirigeants repentis du Polisario, aux initiatives de protestations des émigrés marocains à travers le monde, elles passent à la trappe.
Pourquoi en est-il ainsi? Est-ce parce que nous n'avons pas encore intégré les règles d'une communication moderne, mais efficace, quitte à ce qu'elle soit quelque peu austère. Autrement, pourquoi nous sentons-nous obligés de transformer des voyages professionnels de journalistes étrangers en villégiatures de luxe? Pourquoi a-t-on honte de laisser paraître notre pauvreté, que, de toute façon, nos invités journalistes savent ou finissent par découvrir?
Pourquoi acheter, au prix fort de l'espace dans des revues étrangères, pour des publi-reportages et des couvertures qui ne sont vendus qu'au Maroc? Ce n'est pas de l'info avec sa conception et son impact actuel, c'est de la bonne vieille réclame. Et encore. Dire aux Marocains “tout va bien Madame la Marquise”, est une démarche improductive.
Est-ce pour ces raisons, en particulier, que nous ne savons pas vendre une cause nationale aussi vitale que celle du Sahara marocain?
Mohamed Selhami
À un an des prochaines élections législatives, qui doivent être fondatrices de la nouvelle démocratie marocaine, l’état des lieux est pour le moins préoccupant, voire alarmant.
L'heure de vérité
Le diagnostic est général : les partis politiques marocains se portent mal. Et les symptômes en sont connus de tous : clientélisme et népotisme, affairisme de certains de leurs dirigeants, fonds de commerce électoraux pour des “bandes”, coupure avec les citoyens, déficit du militantisme de proximité. Bref, ils gèrent des situations de rente alors que les exigences du Maroc d'aujourd'hui et les aspirations de ceux qu'ils ont pour fonction de représenter sont aux antipodes de cette situation.
Ce n'est pas faire montre de cruauté que de rappeler que ces maux-là, toutes les formations en sont frappées. L'Istiqlal est en proie à des luttes intestines qui font bien des dégâts. L'USFP aussi traverse une passe difficile, notamment du fait de la “fronde” d'une partie de sa jeunesse et de dissensions au sein de sa direction. Le RNI, de son côté, demeure tétanisé par la crise de confiance qui mine son leadership. Le Mouvement Populaire, enfin, n'a rien réglé avec son congrès d'“unification”, qui a accentué les divisions et les contradictions. Il n'y a peut-être que le PJD qui paraît échapper à cette déferlante de la décomposition et de l'éclatement. Quoique…
À un an des prochaines élections législatives, qui doivent être fondatrices de la nouvelle démocratie marocaine, un tel état des lieux est pour le moins préoccupant, voire alarmant. Comment sortir de cette crise ? La dynamique interne propre à chacune de ces formations sera-t-elle suffisante pour imprimer un nouveau cours ? Rien n'est moins sûr, si elle n'est pas activée par une forte poussée de la base. La mise à niveau des programmes peut influer aussi dans ce sens à condition qu'elle tourne le dos aux habituels
catalogues de vœux sans portée concrète.
En tout cas, par-delà l'échéance de 2007, c'est une problématique plus globale qui est posée : quel système de partis nous faut-il pour élargir et consolider le champ de la démocratie ? Ce qui implique de nouvelles formes d'action pour agréger les demandes des citoyens, promouvoir les élites de demain et participer à la gestion des affaires publiques. On ne peut se borner -comme cela est pratiqué ici et là avec désenchantement et même fatalité- à atteindre le renouvellement des générations et à s'en remettre donc aux lois biologiques. Ce serait la pire des solutions en effet que d'attendre cette “mort lente” en escomptant avec candeur que de ses cendres renaîtront d'autres potentialités à la hauteur des enjeux et des défis du Maroc de ce début de millénaire.
Mohamed Selhami
Driss Basri donne une mesure supplémentaire à son mal-être et aux ressorts les plus profonds de cette descente aux enfers avec l'instruction de l'affaire Ben Barka.
Un témoin encombrant
Il continue donc, Driss Basri. Alors, continuons avec lui pour que tout un chacun mesure jusqu'où peut aller l'ex-ministre de l'Intérieur. Après bien des étapes, le voilà qui franchit désormais un nouveau seuil, en se faisant convoquer -ou plutôt inviter- à “passer à table” au cabinet du juge français Patrick Ramaël, chargé du dossier de la disparition et de l'assassinat du leader de l'UNFP, Mehdi Ben Barka, fin octobre 1965.
Cette démarche est claire: elle participe d'une volonté de nuire au Maroc. Elle a été initiée, on s'en souvient, dès les premières semaines de sa révocation, le 9 novembre 1999. Elle s'était ainsi exprimée tout d'abord sur la critique de l'action gouvernementale d'alors, puis sur le mode de gouvernance; ensuite, elle s'était focalisée sur la qualité des responsables en place, le trait étant d'ailleurs de plus en plus appuyé sur les proches collaborateurs de SM Mohammed VI. Elle s'était également manifestée à propos du Sahara, qu'il a considéré comme perdu si un référendum devait y être organisé. Elle s'était encore poursuivie, ces dernières semaines, avec la “légitimation” des dirigeants du Polisario, parés des vertus de l'honnêteté et du courage. Enfin, cette semaine, c'est sur un autre registre que Driss Basri donne une mesure supplémentaire à son mal-être et aux ressorts les plus profonds de cette descente aux enfers avec l'instruction de l'affaire Ben Barka.
Soyons clairs: c'est, chez lui, une nouvelle preuve de ses capacités de manipulation. Sur le papier, en tant que petit commissaire affecté aux renseignements généraux de Rabat, en 1965, il n'avait rien à voir ni de près ni de loin avec ce dossier -les responsables marocains et français impliqués, à un titre ou à autre, sont connus et pratiquement tout identifiés depuis des lustres. Dès lors, à quoi bon entendre ce personnage comme “témoin”? En fait, il sait évidemment beaucoup de choses sur le traitement et le suivi sécuritaire de ce dossier parce qu'il a eu la haute main sur les leviers de commande de l'appareil d'État.
Les “lignes rouges”, Basri les connaît mieux que personne, ne serait-ce que parce qu'il avait en charge durant plus de trois décennies leur respect et leur sanction. Il s'en est pris aux fondamentaux du Royaume et s'obstine à tenter d'en saper les bases. Il n'ignore pas que la raison d'État et ses intérêts supérieurs, au Maroc comme ailleurs, ne peuvent tolérer indéfiniment d’être mis en cause. Décidément, Driss Basri est devenu de plus en plus un personnage qui joue avec le feu. Un témoin encombrant.
Mohamed Selhami
Voilà bien un signe fort de ce Maroc de 2006, arc-bouté sur ses valeurs et son référentiel, à savoir un État souverain, indépendant, attaché à des idéaux de paix, de coopération et de liberté.
Cinq sur cinq
Les festivités du cinquantième anniversaire de la création des Forces Armées Royales (FAR) ont été marquées, dimanche 14 mai 2006, par le défilé militaire à Rabat; puis, le lendemain, par une autre parade navale, à Agadir. Voilà bien un signe fort de ce Maroc de 2006, arc-bouté sur ses valeurs et son référentiel, à savoir un État souverain, indépendant, attaché à des idéaux de paix, de coopération et de liberté et qui, pleinement, s’affirme tel qu’en lui-même, à travers l’Histoire.
C’est une armée citoyenne qui est là, au service de sa devise: Dieu, la Patrie, le Roi. Autrement dit le socle de granit de fondamentaux; mais c’est aussi une institution, de recrutement populaire, en phase avec la société et ouverte sur elle, s’impliquant dans des missions médicales tant dans le Royaume que dans des pays frères et amis. Une armée de paix donc, en mesure aussi, le cas échéant, de se mobiliser pour la défense de l’unité et de l’intégrité territoriale –comme elle le fait avec bravoure depuis plus de trois décennies dans nos provinces méridionales. Mais il y a plus.
Commandant suprême des FAR, SM Mohammed VI, qui a donné l’ordre voici plusieurs mois de toutes les manifestations marquant cet anniversaire, a sans doute voulu faire passer d’autres messages: que ce corps est une composante organique de la Nation; que cette armée, ni agressive ni belliciste -à la différence de tant d’autres dans notre région- avait bel et bien des fonctions et des missions “normalisées” éligibles au standard des États de droit et des démocraties; et que, enfin, l’édification d’un État moderne en chantier de consolidation s’appuyait résolument sur toutes les potentialités nationales existantes. C’est ce reformatage qui est inscrit à l’ordre du jour. Il valorise des ressources humaines mobilisées vers des objectifs lisibles et mobilisateurs; il accompagne et conforte la place et le rôle des FAR en ressourçant leur légitimité dans le cadre de la légalité, sans oublier les vertus culturelles et pédagogiques de ces manifestations de célébration du demi-siècle qui les a vues naître.
Un message global reçu cinq sur cinq…
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